Laval Virtual, c’est un peu mon pèlerinage annuel : un temps d’immersion dans l’avant-garde des technologies immersives, mais aussi un thermomètre de l’évolution des usages XR à l’échelle mondiale.
Cette 27ᵉ édition ne déroge pas à la règle. Ce qui m’a frappé cette année, c’est la clarté avec laquelle l’IA générative s’est imposée comme levier d’usage concret des expériences immersives : fini les expérimentations gadget — place à des solutions industrielles, culturelles, ou pédagogiques, pensées pour durer et s’intégrer.
La formation immersive : d’un supplément à une brique centrale du parcours apprenant
Depuis plusieurs éditions, la formation via XR s’affirme. Mais 2025 marque un tournant de maturité : les entreprises ne viennent plus tester, elles viennent acheter, intégrer, mesurer l’impact.
Chez plusieurs exposants, les simulateurs n’étaient pas des prototypes mais des produits déjà déployés à l’échelle. Et surtout, ils adressent des enjeux RH et opérationnels bien identifiés : sécurité des agents, maîtrise des gestes métiers critiques, réduction du temps de formation, capitalisation des savoirs tacites.
L’exemple le plus marquant : le simulateur immersif et interactif de feux de caisson, un dispositif habituellement utilisé pour l’entraînement des pompiers. Ce simulateur réalisé par la société AMValor (filiale opérationnelle des Arts et Métiers) immerge physiquement les sapeurs-pompiers dans un feu violent avec température et fumée et permet d’apprendre à réagir en moins de cinq secondes, un délai vital dans ce type de situation. L’objectif n’est pas de remplacer la formation réelle, mais de l’augmenter par la répétition rapide, sans risque et sans logistique lourde des gestes qui sauvent.
Crédit photo pour AMValor - Adrien Vagnon (en haut à droite)
Cette logique de “micro-apprentissage immersif”, intégré dans le quotidien, pourrait préfigurer le futur du training dans l’industrie, la santé, et les métiers d’urgence. Un marché estimé à plus de 6 milliards d’euros d’ici 2028 selon Allied Market Research.
Culture, narration, engagement : la XR devient un langage sensible
Ce qui m’a le plus enthousiasmé sur le plan culturel, c’est la qualité narrative et émotionnelle des expériences proposées. Deux projets se sont vraiment distingués.
“Finding Vincent”, d’abord créé par le studio australien Grande Expériences : une enquête immersive d'environ 15 minutes à travers le regard de Théo Van Gogh, frère de l’artiste. Ici, l’interaction n’est pas technique mais émotionnelle. L’usager circule ici librement dans cette expérience immersive au casque et navigue entre empathie, découverte et introspection dans l’histoire. Le mode multi-utilisateur, intuitif, offre en outre une véritable expérience collective. On est loin du simple “serious game culturel” — on entre dans une nouvelle grammaire muséale, où le spectateur devient partie prenante de la narration.
Ensuite, “Gauguin”, présenté en avant-première par le studio espagnol Garra Producciones : cette exposition virtuelle au casque, d’abord destinée au public panaméen, combine exploration esthétique et acte artistique contributif. À la fin du parcours, les visiteurs repartent avec un NFT composé en style “Gauguin”, participant à une œuvre collective destinée à une vente caritative. Un pont entre art, blockchain et engagement social.
Crédits photo Laval Virtual
On voit ici un potentiel fort pour les institutions culturelles : fédérer des publics, créer de la valeur partagée, et ancrer la culture dans l’ère du web3 et de la co-création.
Gaming & XR étudiante : vers une démocratisation créative boostée à l’IA
Ce que j’ai vu cette année du côté du gaming XR (et des écoles comme l’IIM ou le MIT India) est vertigineux. En trois semaines, des équipes étudiantes parviennent à produire des expériences immersives bluffantes. Trois exemples :
Don’t Look Down : une plongée dans un puits de mine de 12 km.
StarMaze : un labyrinthe intelligent, hybride entre VR et mobile.
Clean History : une Fury Room éducative, pour “purger” l’Histoire.
Pourquoi ce bond de qualité ? Parce que les outils ont changé : l’IA générative (Chat3D pour les objets, Unity AI pour les scripts) et le no-code XR permettent à de petits studios ou labos de produire vite, bien, et sans pipeline complexe.
Autre exemple marquant de ce nouveau souffle créatif : Flipper VR. Cette expérience hybride mêle flipper physique iconique des années 80-90 et univers augmentés au casque plus contemporains. Elle offre ainsi une jouabilité revisitée et étonnamment intuitive qui renouvelle l’usage du flipper, y compris dans sa version numérique. Si l’on en croit son concepteur : le Flipper VR offre des possibilités de gameplay quasi-infinies.
Pensée pour l’événementiel comme pour l’usage domestique, ce flipper XR incarne parfaitement ce qu’on pourrait appeler une “XR rétrofuturiste” — une réinvention d’objets familiers par la technologie.
Crédits photo Laval Virtual
C’est la naissance d’une “culture maker XR” : rapide, créative, agile. Une bonne nouvelle pour les PME, les startups et les industries culturelles qui veulent produire sans dépendre de studios AAA.
Hardware XR : vers une logique modulaire, mobile, multisensorielle… et accessible
Côté matériel, trois tendances claires émergent.
La nomadisation : avec une solution SaaS comme Explorations360, qui permet de déployer simplement une expérience immersive en 360° sur site, sur le web ou en mobilité. De même, sur le stand de HTC, qui mettait en avant cette année ses partenaires technologiques, la société Inversive présentait sa plateforme de diffusion XR multi-formats et multi-devices. Des solutions idéales pour l’événementiel, le retail, ou la formation immersive sur le terrain.
L’intégration sensorielle : Olfy, avec ses cinq senteurs distinctes et son moteur d’application (de la parfumerie à la médecine légale), incarne une tendance XR qui stimule tous les sens. La VR devient polysensorielle, plus ancrée dans le réel.
La précision physique : le simulateur de tir QB Technologies, avec véritable recul d’arme, permet une immersion professionnelle pour les forces de l’ordre ou les agents de sécurité, combinant matériel réel et environnement virtuel.
Mais au-delà du matériel, ce sont aussi certaines solutions logicielles “game changer” qui ont retenu l’attention.
Presence, une pépite venue des Pays-Bas, propose des réunions immersives où vos interlocuteurs apparaissent sous forme d’avatars holographiques dans un même espace VR. Une alternative crédible à la visioconférence, pensée pour les interactions à haute valeur relationnelle.
Fectar, sur le même stand, pousse la logique d’accessibilité à son extrême : sa plateforme XR permet de créer des modules de formation immersive sans aucune ligne de code, avec un déploiement simple sur tout type de casque ou device. Une vraie promesse pour la démocratisation de la XR dans l’éducation, la santé, ou la formation pro.
Crédits photo Laval Virtual
Ces innovations dessinent un futur XR modulaire, interopérable, sans friction. À la croisée du web immersif et de l’edge computing.
Le projet qui change le regard
Parmi les expériences les plus marquantes : celle du scaphandre VR pour vivre à hauteur d’enfant. Créé au Japon par le professeur Murakami, ce dispositif permet aux adultes — et en particulier aux futurs parents — de ressentir le monde tel qu’un jeune enfant le perçoit. Vision déformée, interactions complexes, monde surdimensionné.
Dans un pays confronté à une natalité en berne, cette expérience est un outil de sensibilisation sociale et psychologique. Elle résonne aussi avec d’autres enjeux : perception du handicap, immersion pédagogique, design inclusif.
Ce projet montre que la XR peut aussi être un vecteur d’empathie, de transmission et de transformation sociale.
Et pour Worldline ? Une XR transactionnelle à inventer
Chez Worldline, nous explorons depuis longtemps les futurs possibles de l’interaction digitale. Ce que cette édition confirme, c’est que les environnements immersifs ne seront pas “à côté” de nos usages quotidiens — ils en feront partie.
La question devient : comment payer, s’authentifier, contractualiser, expérimenter dans un monde en 3D ? La VR ne sera pas seulement une scène, elle sera un point de contact. Et à ce titre, elle doit intégrer des logiques de confiance, fluidité, sécurité — notre cœur de métier.
L’enjeu n’est plus de créer un métavers — mais de garantir que celui-ci soit “vivable”, fiable, utile.
Cap Digital vous embarque à Vancouver pour le SIGGRAPH 2025
Après Laval, cap à l’Ouest ! Le SIGGRAPH, conférence internationale incontournable en matière de computer graphics, technologies immersives et contenus interactifs, revient à Vancouver pour sa 52ᵉ édition, du 10 au 14 août 2025. Cet événement majeur réunira des milliers de professionnels du secteur, offrant une opportunité unique de présenter l'excellence française sur une scène mondiale.
Cap Digital, avec le soutien du CNC, organise le Pavillon France sur le salon. Ce stand collectif premium mettra en avant les entreprises françaises innovantes dans les domaines de l'infographie, de l'animation, de la 3D, des VFX, de la XR et des technologies immersives.
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